Mime et arts du geste - Festival Mimesis - IVT - International Visual Theatre - Paris - 1, 2, 3 décembre 2022

 


 Parler de mime c’est à la fois convoquer un imaginaire passant par des figures populaires telles le mime Marcel Marceau ou Baptiste Deburau acteur et personnage du film de Marcel Carné "Les enfants du Paradis" mais aussi faire référence à un art gestuel parvenant à dire sans parole. Souvent évoqué avec un rien de mépris, d’aucuns relevant que cet art manque de modernité, sa force de jeu lui a pourtant permis de se glisser partout que ce soit dans le théâtre, la danse, les sketchs humoristiques, les numéros de cabaret et même chez les artistes du stand up qui font aujourd’hui appel à lui.

Art de l’interprète par excellence tant le « dire » passe par les 5 sens, la communication directe qu’il génère avec le public est un atout majeur dans le spectre du spectacle vivant. Une nouvelle génération l’a compris et depuis 12 ans une réflexion sur une définition actuelle des arts du mime et du geste, sur leur enseignement et sur les créations qu’ils proposent a permis au mime de se déployer dans un univers jeune, plus structuré et surtout plus collectif dans sa démarche.

Le festival Mimesis organisé par la Cie Hippocampe, Les Éléphants Roses et Mangano-Massip et soutenu par la ville de Paris est le résultat positif de ce travail de remise en chantier des acquis car donner une visibilité à de nouveaux artistes est un gage de  pérenité

 De quoi « mime » est - il le nom ?  

Pour cette 11ème édition, le festival change de format : 3 soirées, toutes différentes, composées de 3 spectacles de 20mn chacun, avec des avants et des après participatifs et conviviaux. Théâtre physique, mime, théâtre gestuel, comédie physique les appellations sont variées les artistes marquant par ce geste que le mime est art qui regorge de subtilités qu'eux - mêmes savent définir.

Le croisement des esthétiques prend également sa part au spectacle notamment avec Gwenola Lefeuvre dans « Tituber ». Sur le thème connu de la boisson - réconfort que l’on boit avidement jusqu’à en tituber, elle développe une gestuelle à la précision remarquable tout en nous livrant des mots compréhensibles uniquement par elle-même.  Il ne s’agit pas pour elle de simplement perdre l’équilibre et de chuter accompagnée de borborygmes mais de trouver, grâce à un jeu de poids et de contrepoids, l’arythmie d’un corps en perte de contrôle. Ces déséquilibres magnifiés par un travail d’articulation réalisé dans un mouvement en succession rappellent la finesse des qualités développées dans la danse. Son personnage est émouvant, timide et bafouillant, au visage angélique et déterminé. Très juste dans les contraste, la comédienne semble autant placide face à la bouteille que dévastée de l’intérieur par ce qu’elle doit nous dire. Belle découverte.

Dans la même soirée, une autre dérive du temps nous est comptée : la guerre. On retrouve avec Adrien Fournier et Alexandre Finck, un duo composé du fort et du faible, du sachant et du naïf ou du beau parleur et du faire valoir, (c’est selon) susceptible de créer des situations comiques. Un sabir sert de langue à ces deux - là qui, dans un mime traditionnel, nous embarquent dans une loufoquerie toute militaire. Ils tirent l’écriture vers la forme d’un sketch comique, c’est drôle, bien interprété. 

Le match de Simon Pierzchlewicz et Lautaro Valenzuela qui finit la soirée nous laisse KO. Ils sont deux, un grand costaud et un petit finaud. Exubérants à souhait dans ce délire sur la compétition le public aspire qu’à une chose se protéger…   

 

Douceur, délire et imagination 

 


Une proposition de marionnette nous accueille le lendemain. Un moment d’humanité et de délicatesse. Un homme, une femme allongés, un espace circulaire recouvert d’un drap, deux solitudes. Le marionnettiste Valério Point s’approche d’eux ; sans les déranger il manipule tendrement les fils jusqu’à les éveiller l’un à l’autre dans la fragilité de la rencontre. C’est beau, c’est doux, c’est troublant.  

Karine Pontièes affiche déjà un parcours, des créations et une visibilité. "Subito" qu’elle présente est un duo très technique, rigoureux et formel. Les gestes du quotidien et des moments traversés construisent une dramaturgie qui accroche ou dérange. Froideur pour les uns, réalisme pour les autres ; théâtre, mime, danse tout est là pour solliciter notre imaginaire. Inspiré par « L’infra ordinaire » de Perec ce moment nous laisse interrogatif.

Olivier Germser - Rémy Vachet

Le prisonnier aux prises avec ses démons nous réveille… Évasion ou pas ça déménage sur le plateau, le lit à barreaux joue le jeu, À l’endroit ou à l’envers il bouge, roule et tourne provoquant le délire jusqu’à la création d‘un ami imaginaire. Le déferlement des souvenirs et la révolte parlée chantée nous font passer du rire à l’admiration délayées dans un sentiment de terreur à la sauce jusqu’où va-t-il aller.  

La diversité s’est exprimée 3 jours durant, indispensable au dynamisme d’un art. Jouer avec l’imaginaire du public était au cœur des propositions, postulat exprimé sans retenues dans une grande liberté de formes. Un moment précieux pour le public si ce n’est essentiel.

 

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