Performance - Shingo Ota, Kyoko Takenaka - Maison de la culture du Japon - Paris - 15 au 19 novembre 2024
Tradition et transmission sont au cœur de ce spectacle performatif autant caustique et baroque que sérieux. À partir de la geisha, image symbolique et avantageuse du japon les auteurs Shingo Ota et Kyoko Takenaka pose la question de la pérennisation d’un art traditionnel dans une société moderne dont les codes se heurtent à son besoin d’histoire. Sur scène accompagnés du musicien Kazuhisa Uchihashi, les deux interprètes nous livrent leur réflexion sur la place de la tradition dans le Japon aujourd’hui.
Passé - Présent
Tout commence par des images projetées en fond de scène. Sur l’écran on assiste à la transmission d’une danse par Hidemi, la dernière geisha, à la comédienne Kyoko Takenaka partenaire du documentariste Shingo Ota sur le projet, l’atmosphère est feutrée, les gestes de la geisha extrêmement précis et délicat, mais on assiste aussi à une conversation animée entre les auteurs sur la pertinence du choix de cette recherche autour du portrait de la geisha. À ces images du présent répondront durant le spectacle des images du passé, des photographies en noir et blanc représentant Hidemi dans des scènes de la vie d’une geisha, en costume traditionnel, maquillée et portant nécessairement la perruque. Si l ’espace de la transmission, la maison, est intime, restreint, l’espace de la conversation, la voiture, est bruyant, confus, quotidien. Kyoto Takenaka y aborde la question féministe rejetant la position de la femme dans la tradition telle qu’elle apparait à travers la vie d’Hidemi, le documentariste revendique son interrogation sur l’écart entre l’imaginaire convoqué par ce symbole japonais et la réalité. La juxtaposition des mondes apparait alors comme une des problématiques de ce spectacle qui au gré du récit va mélanger les époques et les styles
Hidemi, la dernière geisha
Sa vie se déroulera ensuite de banquets en banquets.
La danse est au centre de cet art traditionnel : descendre le bassin, moins incliner la tête, l’éventail à l’horizontal, l’apprentissage passe par les mots, les codes et les références. La posture dans la vie comme dans la danse doit être parfaite. Bras, buste, tête, lenteur du geste, bas du corps fermé, l’art est exigeant. Entre démonstrations sur le plateau, images et textes, les danses apparaissent complexes, vivantes, avec un vocabulaire corporel parfois audacieux comme cette posture en appui sur les épaules jambes en l’air. Et surtout toutes racontent des histoires comme La floraison de l’iris qui a séduit Ota. Face à cette transmission par Hidemi, le féminisme revendiqué par Takenaka ne résiste pas : être geisha relève d’un art traditionnel que l’on apprend et que l’on pratique. La femme s’efface au profit de l’art. Finies les postures contemporaines, retour à la tradition…Ota séduit par le code entre dans la danse et performe…
Spectacle multiple
Dans sa forme la proposition mélange à la fois le récit sur la création du spectacle et le spectacle : des vidéos et des performances au plateau ; une interpellation du public pour l’inviter à réfléchir aussi bien à la question de l’artiste aujourd’hui qu’au besoin de préserver les traditions par des subventions…L’ensemble qui se déploie sur trois espaces -écran, plateau, salle- semble parfois décousu mais la deuxième partie qui engage les artistes dans un Battle nous renvoyant à une réalité plus dure, la rivalité des geisha de villes à villes, provoque un sursaut émotionnel étonnant.
La question de la perpétuation des traditions est d’ailleurs un sujet qui traversent régulièrement la pensée d’artistes contemporains de différents champs. Théâtre, musique, danse cette problématique irrigue les créations soit en devenant le moteur d’une écriture nouvelle soit en interrogeant l’effacement dû au temps qui passe. Cette sensibilité se retrouve par exemple au centre de Sketches of Myahk documentaire de Koichi Onishi sur la préservation par les habitants des chants des ancêtres et des chants sacrés des iles Miyaka, Okinawa programmé récemment à Paris.
Les dernières geishas
Spectacle performance
Mise en scène et interprétation Shingo Ota, Kyoto Yakenaka
Musique Kazhisa Uchihashi
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