Danse - Signes d'Automne - Le Regard du Cygne - Paris - novembre 2021

 

SIGNES D'AUTOMNE 2021

 

Le Regard du Cygne

Le Regard du Cygne est un Lieu, un lieu pour la danse et les danseurs, un lieu privé pensé en 1982 par les Guibert, Amy Swanson et Alain Salmon pour qu’y vive la création. Cet endroit, où l’on aime aller, a su nous faire découvrir des artistes, nous faire apprécier des démarches inattendues, éveiller notre curiosié, nous retenir. Mur en pierre, parquet noble, gradins de récupération, Le Regard du Cygne n’a rien à voir dans sa philosophie avec un théâtre voué à la diffusion… Pratiquer, créer, montrer c’est ce qu’on y fait avec simplicité. Les choix artistiques des artistes qui le font vivre sont situés loin des modes et des problématiques de « programmateurs ». Créativité et poésie d’abord ! 

 

anHtoB - Mié Coquempot , Alexandra Damasse

Au fil du temps des rendez - vous se sont imposés comme les « Signes » de printemps et d’automne depuis 2012 et Les Spectacles Sauvages ces moments où l’expérimentation y est encore possible, et que l’on souhaite voir préserver encore longtemps.
 
Pour ces Signes d’Automne 2021, le retour aux pièces courtes et aux soirées partagées architecture l’ensemble de la programmation. De la Soirée premiers soli on retient tout d’abord le plaisir de revoir anHtoB, solo créé par Mié Coquempot en 1997 qui nous renvoie à l’époque d’un minimalisme conceptuel, à la précision du geste et au rapport musique - mouvement distant mais vivant. Cette force tranquille est vite bousculée par Osterreich de Mélodie Lasselin qui met à jour l’évidence que le corps porte l’histoire du mouvement -presque de façon intuitive- et que son propre corps de danseuse contribue malgré lui à écrire cette histoire. L’histoire intime se mêle à la construction du vocabulaire de la danse de tous et se joue des stéréotypes.  Le corps dit sa souffrance, se blesse, mais le mouvement lui reste là aussi kitch soit -  il… L’interprète affirme ses choix et nous renvoie à cette histoire des corps et des gestes dont on sentait qu’elle était aussi ce soir - là celle du public. C’est facétieux et convaincant.

Nina Vallon, initiatrice de cette soirée, par l’effet d’une danse construite dans une succession de mouvements aux initiations nettes, nous entraine dans le sillage d’un long ruban qui s’enroule et se déroule ou s’immobilise au gré de la musique. On se pose la question d’une approche gestuelle, systématisée dans ce solo de 2007 On first counterpoint, qui ferait appel aux techniques somatiques pour trouver la fluidité du mouvement. La présence de la violoncelliste Joana Schweizer donne du relief au dialogue entre Bach et la danseuse qui reste malgré tout assez conformiste. 

 

Sylvain Ollivier - Prouesses de l'échec
Avec Sylvain Ollivier, première partie d’une Soirée partagée, il faut plonger, ne pas rester à la surface de sa proposition pour en gouter toutes les saveurs. Sa présence nous touche d’emblée. À la fois solide et fragile, son corps imprime l’espace même immobile. Tout droit sorti de la Sorbonne ou jeune homme ne s’assumant pas, il parle, commence un long discours sur les normes, les codes, le bon gout. L’espace est parsemé de pupitres qu’il rejoint ou quitte dans des marches radicales. Ce discours fait apparaitre une personne en questionnement dont les mouvements se décentrent et s’effilochent à chercher « autre chose ». Il est impeccable face à nous, sérieux et drôle mais surtout exact dans le déplacement du sens et l’effacement progressif des certitudes. Pas moraliste pour deux sous il nous conseille quand même d’être Soi - même.

 La règle de Spectacles Sauvages est « 15mn maxi ». Ce format est l’occasion de bouts d’essais, de recherche sur un thème et permet de confronter sa gestuelle à un public. On sourit à 440HZ de Claire Lavernhe qui nous embarque dans un karaoké gestuel. Ravel offre ses notes que le chef d’orchestre maitrise dos à nous, face à …. Son corps s’anime, c’est sympathique mais malheureusement nous connaissons trop bien ce jeu ! On ira de Thallia Pigiernous étonne, que se passe t - il sur le plateau ? Deux femmes, marchent, se cherchent, se ratent. Dans l’espace balisé de ces allées - venues, les plantes changent de place, nous changeons de regard. La présence – absence des interprètes a du charme même si quelque chose nous échappe.

Dans le creux de l’absence de Eva Assayas est un projet à la fois simple et ambitieux. 3 filles dans un mouvement continu, évoluent dans la lenteur. Un lien intime les tient ensembles, le silence les entoure. Parties du tableau « les trois jeunes femmes » du peintre danois Hammershoï, leur recherche poursuit la pensée même du peintre qui refusait le monde extérieur. Elles semblent happées par un vide intérieur où git, sans doute, un désir de mouvement. Aucune psychologie, aucune relation entre elles, seule cette lenteur mélancolique qui guide vers l’abstraction. A suivre…

Toutes ces découvertes font du bien même si beaucoup d’entre elles demandent encore travail et réflexion. Une nouvelle équipe est à la tête du Regard du Cygne notamment Zoé Salmon (fille d’Amy Swanson) et l’on sent que la ligne directrice de la programmation n’est pas encore claire. Les spectacles pour enfants, les conférences et les hors - les murs imbriquées dans des propositions plus personnelles, souvent en forme d’essais, n’en facilitent pas forcément la lecture. Un parti pris peut - être plus exigent mettant en avant la création personnelle et la recherche devrait s’affirmer progressivement car ce Lieu est un Lieu précieux pour la danse.   

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