Aria - 20 èmes Rencontres Internationales de Théâtre en Corse - Pioggiola - Olmi Cappella - 5 au 12 août 2017



Quand le travail est un plaisir la vie elle vaut la peine.
Les bas-fonds -  Maxime Gorki


A Stazzona
Portées par l’ARIA (association des rencontres internationales artistiques), Les Rencontres internationales de théâtre, moment fort du projet de l’association, se déroulent chaque été en Corse, depuis 20 ans. Voulues par Robin Renucci elles portent certains des objectifs défendus par l’éducation populaire comme libérer l’imagination, l’envie, la créativité, l’audace pour permettre la transformation personnelle et sociale. Projet culturel autant que projet citoyen, des thèmes comme l’autonomie, le faire ensemble, l’affirmation que chacun est porteur d’un savoir à partager sont abordées à travers la création théâtrale, cœur de ces Rencontres.  Robin Renucci tient à cet état d’esprit qui positionne ce temps d’été comme un moment de partage et non comme un festival. Mettre en relation le public, les artistes et les œuvres par la représentation mais aussi la discussion, A Chjachjiarata est là pour çà… Chaque après - midi le public, les artistes et parfois les badauds viennent pendant 1h30 exprimer plaisir, doutes, interrogations sur ce qu’ils ont vu en spectacle ou vécu lors des ateliers sans qu’aucune hiérarchie ne soit instaurée dans la parole.   
 
La grande salle -  A  Stazzona
Pour cette 20ème édition : créations théâtrales, lectures, impromptus et bien d’autres moments où textes, corps et voix se font l’écho de ce désir de théâtre qui animent les participants.
Les metteurs en scène Pascale Blaison, Marie Favre, Olivier Letellier, Camille Nesa, Jean-Yves Ruf, Chany Sabaty, Guillaume Séverac-Schmitz, Céline Vincent et deux stagiaires Romain Gneouchev, du TNS à Strasbourg, et Hugo Roux, de l’Ensatt à Lyon sont présents sur le site depuis 1 mois. Ils guident dans un processus de création les 80 stagiaires -garçons et filles de tous âges et de tous pays, amateurs ou professionnels- venus se ressourcer, se former ou découvrir. Pascal comédien professionnel de Bastia aime ce brassage. Il constate « Mon envie de faire du théâtre je n’osais pas en parler car la vie en Corse ne porte pas à ça. Le théâtre en Corse n’est pas culturel, il n’y a pas d’école de théâtre», Un premier stage à l’Aria lui a donné confiance jusqu’à le faire changer lui et ses peurs. Il avoue qu’il ne savait rien du travail intense à fournir, du temps à accorder à la pratique, du parcours personnel à accomplir, de l’investissement que le théâtre demande… « Écouter les mots des autres, leur façon de parler, se confronter aux textes, Le stage m’a donné conscience que je pouvais apprendre, évoluer. C’est un apprentissage de soi….  La corse est un peu égocentrée, je me suis ouvert ». Un deuxième stage a confirmé son désir « devenir comédien », et lui a permis de faire un choix. Il a décidé de faire du théâtre pour lui, d’écouter son envie et son besoin d’expression. L’Aria l’a guidé … Comédien professionnel aujourd’hui, il est là avec les autres, disponible, ouvert. ‘Trouver la beauté en soi même pour se sauver » dit - il …. Le changement de l’individu par l’art Robin Renucci y croit et l’Aria propose toute l’année des stages, des moments de rencontres, des présentations de travaux à destination des professionnels comme des amateurs jeunes et moins jeunes. …
Mon petit coeur


Serge Nicolaï, responsable artistique et pédagogique depuis peu, arrive avec son expérience de comédien auprès d’Ariane Mnouchkine. Ces premières Rencontres il les a vécues au côté des stagiaires en les guidant dans des lectures collectives et en leur laissant une liberté « surveillée » pour des impromptus. 12h dans la cour de la maison Battaglini, à l’ombre des arbres un groupe s’installe. Garçons et fille, assis sur une table les pieds sur les bancs, robes fleuries, chemises de couleur….  En attendant le repas un travail de lecture collective prend forme. Mon petit cœur leur a été proposé par Serge Nicolaï … "Être dans le désir de dire des choses", "juste parler ", "le théâtre c’est de la revendication" forts de ces quelques indications les 12 jeunes s’engagent dans ce texte difficile et disent sur un fond musical, sans raccourcir les mots, en faisant concorder musique et texte …  C’est beau, on en oublie le bruit des assiettes !

 Pendant 3 semaines le rythme est soutenu, le travail sur les œuvres qui seront présentées au public demande à être là, présent corps et âme
 
Les bas - fonds - Maxime GORKI
16h derrière l’église de Pioggiola, un espace accoté au vide. Soleil, (il fait 30 °), poussière, manque d’eau dans les rivières et feu au loin…. Les éléments accompagnent violemment le travail des 16 comédiens qui vont jouer Les bas-fonds de Maxime Gorki. Ancrés dans le sol, engagés dans le corps ils répètent un peu partout dans cet espace, à deux, seul ou en groupe. Leur objectif réussir à « aller chercher le spectateur par le corps et par la voix » comme leur a demandé le metteur en scène Guillaume Séverac-Schmitz. Ils tentent et se confrontent à cette notion d’état c’est à dire à ce moment où le corps est en adéquation avec la pensée, sérieux, attentifs aux autres, portés par le texte. La pièce qu’ils sont en train de travailler demande un engagement sans failles. La mise en scène joue de l'espace à la fois protégé et ouvert. Les comédiens entrent et sortent de 3 cotés en traversant les rangs des spectateurs. Le décor est simple :  divans, fauteuil, table et marches en pierre…Pauvreté, alcool, désillusion et mort. Le théâtre est là physique, rugueux, sensuel, défendu par des comédiens habités… Répéter le jour, jouer la nuit ? Un bonheur. 

L’Aria est également  un lieu où l’on écrit. Alice Zéniter et Clément Camar – Mercier ont été accueillis cette année en résidence d’écriture et leurs textes respectivement Quand viendra la vague et Les témoins (mondialisation) sont mis en scène pour cette 20ème édition des Rencontres.
En contre bas du théâtre A Stazzona, un atelier improvisé. On y trouve du plâtre, des matériaux divers, fer, bois, plastique, papier, des outils … Pascale Blaison est marionnettiste et son challenge est de mettre en relation le texte d’Alice Zéniter et la technique de la marionnette. Les stagiaires sont conviés en 3 semaines à fabriquer leurs marionnettes et à apprendre à les manipuler. Pour la marionnette à tige il faut en premier lieu dessiner le masque, le créer en terre glaise puis le mouler en plâtre. D’autres types de marionnettes sont abordés comme les Kokoschka et d’autres plus simple comme la marionnette à gaine. "Fabriquer sa marionnette rajoute de la sincérité et de la vérité au jeu" explique Pascale Blaison "car on est en contact direct avec elle et la symbiose est plus évidente".



Quand viendra la vague - Alice ZENITER
Le texte -un dialogue entre deux personnages animés par la question écologique- n’est pas écrit pour la marionnette, il devra subir quelques adaptations. Tous les stagiaires vont jouer et jouer tout. Déterminer le dispositif scénique est important pour Pascale Blaison, le texte viendra après. Mettre la bonne voix sur la marionnette et les  mouvements qui vont avec, choisir la bonne marionnette pour telle ou telle séquence. Les marionnettes dans leurs diversités sont là pour donner une lecture plurielle à cette fable sur la montée des eaux. Il en ressort un spectacle poétique aux images fortes, joué dans les brumes de la tombée de la nuit. 
Les témoins (mondialisation) pièces aride et désespérante a été confiée à deux stagiaires Romain Gneouchev, du TNS à Strasbourg, et Hugo Roux, de l’Ensatt à Lyon. Deux containers de couleur rouille disposés le long d’un mur sans grâce abritent les hommes dont il est question : « nos » témoins.  Des chemises blanches proche de la guenille, une danse rythmée pieds frappés au sol (un emprunt à May Be de Maguy Marin),  des voix aux sonorités travaillées, la situation est d’emblée clairement explicitée et le texte qui nous parle de nos dérives actuelles et des désordres du monde prend tout son sens. Les personnages archétypaux (migrant, psychotique, délocalisée, apatride.) qui content avec simplicité leur histoire dans cet espace brut nous refroidissent à chaque phrase.
  
Les témoins (mondialisation) devant le bâtiment Battaglini
Et puis il y a des récits mis en scène : Moby Dick, La petite Danube aux images fortes, Le courage de ma mère  texte étonnant sur un moment de notre histoire pendant la guerre de 40, de grands classiques comme  La vie est un songe dont Jean Yves Ruf s’est emparé comme prétexte pédagogique « Faire travailler la voix et le texte dans un espace vaste et accidenté »  et aussi un conte moderne  La vie rêvée de Noël Battaglini, enfant du pays parti en Égypte travailler à la construction du canal de Suez. Cet homme fit don de sa fortune au village à condition qu’elle serve à l’éducation et à l’instruction des jeunes.
Sa vie reste un mystère que l’équipe de l’Aria entend bien percer un jour . … à suivre ! 

A Stazzona – 20259 Pioggiola
contact@ariacorse.net  
04 95 61 93 99

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