DANSE « Pour sortir au jour » Olivier Dubois - Festival Les Singuliers - le 104 - 21 - 26 janvier 2019




LUI - Olivier Dubois 


Donner à voir au public le métier d’interprète dans sa complexité est le challenge que s’est fixé Olivier Dubois avec son spectacle solo "Pour sortir au jour". Et c’est à un drôle de jeu qu’il nous convoque.
Dans un dispositif qui fait penser à un ring il va jouer, livrer bataille mais surtout se livrer pendant 1h30. Les spectateurs du 104 dont le nombre est limités à 120 sont installés sur trois côtés, en fond de scène trois chaises dont on se doute qu’elles vont accueillir l’un ou l’autre de nous et le bureau d’Olivier D avec son ordinateur, mais aussi une flute à champagne et la bouteille qui va avec. C’est simple, la proximité est réelle. Toujours un peu excessif, lui fanfaronne avec bienveillance, nous parle, se moque, joue un jeu qui rappelle les bateleurs de foire. Son costume acheté au Caire scintille sur ce corps dont on sait qu’il porte aussi un pan de l’histoire de la danse de ces dernières années.
46 ans, danseurs depuis toujours, travailleur acharné, heureux des challenges que la danse lui propose... Ces challenges il veut nous en faire partager le gout.

Le dispositif est participatif et interactif et même si c’est à la mode, c’est un moyen unique de nous rendre complices. À tour de rôle on s’assoit sur les chaises à ses côtés, on tire une enveloppe et apparaissent le nom d’une chorégraphie, de la musique initiale et un spectateur choisit de le délester d’un de ses vêtements. À l’énoncée du titre, de la musique on sent déjà le corps se préparer, la mémoire organique est à l’œuvre. Aux éléments du costume on sent le cerveau pointer les difficultés qui s’annoncent ; danser Raymonda de Noureev avec une seule chaussure ? il assume. L’émotion est palpable on vibre avec lui. Les corps sont aux aguets, les nôtres comme le sien. Le mouvement arrive en lui précédé de ce pré mouvement qui vivifie le centre; la concentration envahit son visage; le souffle apparait maitrisé.  Sous nos yeux le bateleur se transforme en artiste.

Du processus aléatoire qu'il a choisi, jaillissent des extraits des 60 spectacles auxquels il a participé : Angelin Preljocaj, Jan Fabre, Karine Saporta, Andy de Groat, Béjart, Dominique BoivinSasha Waltz, le cirque du soleil et même Céline Dion qui flirte avec In The Middle, Somewhat Elevated de William Forsythe et Raymonda de Noureev. Pour chaque extrait le corps trouve sous nos yeux sa puissance, son style, l’artiste sa motivation. On se demande d’où il tire sa force… Des anecdotes drôles ou tristes accompagnent parfois la préparation du corps et c’est tant mieux car la danse c’est sa vie et dans ses moments on est sure qu’il ne triche pas.
 
Ce témoignage du travail de l’interprète est sans complaisance.  
Capable de tout endosser, de donner sens à chaque geste, d’exécuter avec foi le désir du chorégraphe pour le servir, l’interprète, souvent oublié des génériques, est le cœur de la danse. Devant nous Olivier le sait, il y croit, il nous le montre et nous embarque dans ce chemin dont on comprend que plaisir s’accorde avec sérieux, sincérité et respect des œuvres. C’est très beau.
Oui Olivier Dubois est bavard, démonstratif, provoquant…  Peu importe, il est avant tout un danseur remarquable. Et l’on reste subjugué face à ce corps si mystérieux capable de nous livrer le beau à chaque instant. Ne nous embarrassons pas d’autres choses.  


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