OSCYL - Fattoumi - Lamoureux - Théâtre National de Chaillot - 22 au 24 février 2018

Et si Oscyl était un ballet romantique ou un ballet de princesses comme disent les enfants ?
Il (ou elle) est là au centre du plateau à se balancer d’un coté à l’autre comme les jeunes filles se dandinent d’un pied sur l’autre attentives au moindre frémissement annonciateur de la venue de l’Autre … celui qui, celui que … Belles endormies depuis 100 ans, elles savent que la rencontre est décisive. Sentir le plaisir de l’amour naissant a de quoi vous faire chavirer. L’Oscyl n’échappe pas à la règle ! Jeunes filles encore fragiles ou objets inanimés seul le contact de l’Autre -  baiser pour les unes, corporéité dansante pour les autres- peut donner sens à la vie. 
Seul en scène, le prince -ou princesse car quel est finalement le sexe de l’Oscyl- est là, élu certes mais comme toujours jamais seul car le corps de ballet n’est pas loin…  À jardin 6 Oscyls bien rangés, avec chacun leur spécificité, attendent leur entrée.
Tout est là pour nous raconter l’histoire d’une Aurore ayant abandonné ses pointes. L’Oscyl, sculpture élégante, lisse, aux formes arrondies, trouées de ci de là comme les sculptures d’Henry Moore invite à la rencontre. Il est beau ce prince (ou princesse), vacillant sur sa base mais inébranlable car frappé(e)) ou renversé(e), il se redresse et revient à la verticale en oscillant comme pour dire que l’amour dure toujours. Créé à taille humaine par le plasticien Stéphane Pauvret à partir de l’œuvre l’Entité Ailée de Hans (ou Jean) Arp il semble le partenaire idéal…. Fantasmé à souhait ! Car toute la pièce est là dans ce rapport à l’autre réel ou imaginaire, vivant ou inanimé mais toujours en mouvement… L’époque romantique nous introduisait volontiers dans le règne de la danseuse belle et éthérée, presque évanescente dévoilant une forme de nostalgie ; le danseur étant celui qui porte et met en valeur la délicatesse de sa partenaire. Cet Oscyl à l’instar des princesses fait de son raffinement une arme de séduction à toute épreuve. Ballet blanc à lui tout seul.   
Pas de deux, pas de trois ou plus ; on explore, on ensorcelle et on joue. Le ravissement n’est pas loin. Les contacts sont subtils, inventifs. Mais parfois intrusifs comme s’il fallait vérifier quelque chose … Le corps de ballet déboule avec force mélangeant corps et objets dans la recherche d’une identité hybride.  Courses, équilibres, portés, roulades mais aussi fusion « corps – objet » et quête d’une assimilation impossible. Sans cesse Il est question de charmer pour embrasser. Comprendre l'inexplicable/ de la relation. Mais comme toujours on se raccroche à ses vérités. Le prince fait le prince et Monsieur montre ses muscles. Pas de tours en l'air ni de portés vertigineux, un instant il exprime sa virilité en faisant tourner l’Oscyl comme un lanceur de marteau ou en se livrant à des épaulés- jetés d’haltérophiles.  



Comme pour nous sortir de nos rêves à l’eau de rose, une séquence fougueuse, très année 80, nous entraine au Palace où il s’agit de danser, provoquer, rire et séduire. On le sait, le romantisme sévit à toutes les époques et hommes – hommes – femmes – femmes - hommes etc..  l’attrait pour l’autre sait prendre bien des formes. Cette chorégraphie collective pose la question du genre, les gestes se précisent féminin ou masculin ou les deux.  Quel est cet Autre auquel je me livre… Les chorégraphes parlent des 4 voies possibles de la relation à l’autre :  la compétition (agôn), le hasard (alea), le simulacre (mimicry) et la recherche du vertige (Ilinx). Seraient-elles le cœur de cet instant qui conjugue domestication de la scène et affranchissement des corps. Séquence étonnante dans son apparente évidence mais qui l'ombre d'un instant fait surgir l’être dans sa complexité émotionnelle et dans sa réalité discordante.

Si on ne s’intéresse qu’à l’objet, l’Oscyl, à sa beauté, à ses origines, la pièce reste assez scolaire et un peu morose mais en la tramant de nos univers émotionnels fantasmatiques elle devient finaude, gaie et drôle.  La matérialité du principe corps - objets s’efface au profit d'une relation désirante car tout objet est porteur de désir …

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